Crédit public et crédit privé : lequel prioriser en tant qu’investisseur?
Sommaire
- Les actifs gérés dans le domaine du crédit privé ont connu un véritable essor au cours de la dernière décennie. Selon plusieurs estimations, la taille du marché se situerait entre 2 T$ et 3 T$ US.
- Bien que le crédit public et le crédit privé soient souvent nettement distincts dans l’esprit des investisseurs et dans l’allocation stratégique des actifs, ils présentent plusieurs caractéristiques communes.
- Si nous pensons qu’il est possible d’effectuer des allocations à long terme dans les deux catégories, nous estimons que le pendule de l’intérêt des investisseurs a trop basculé en faveur du crédit privé. Les investisseurs pourraient bénéficier de l’ajout du crédit public à leurs portefeuilles.
- Le crédit public diversifié, surtout s’il est mis en œuvre dans le cadre d’une stratégie non contrainte permettant d’exploiter les inefficacités des marchés publics, offre aux investisseurs un potentiel de rendement attrayant, plus de transparence et de liquidité, et peut constituer un ancrage au sein d’un portefeuille bien diversifié.
Croissance historique du marché du crédit privé
Si le crédit privé existe en tant que classe d’actifs investissables depuis vingt ans, il a connu une croissance explosive au cours des cinq dernières années. L’un des principaux catalyseurs de cette croissance a été la mise en œuvre de régimes de capitaux bancaires plus stricts à la suite de la grande crise financière. Ces régimes ont exigé que davantage de capital bancaire soit mis en réserve pour les prêts aux entreprises. L’augmentation des exigences en matière de capital a entraîné une baisse des activités de prêt direct, notamment aux petites entreprises, avec une augmentation correspondante de la souscription, de la distribution et de la négociation d’obligations et de prêts d’entreprises auprès d’autres acteurs du marché. Ces autres acteurs du marché comprennent les prêteurs non bancaires, tels que les sociétés de gestion d’actifs et les régimes de retraite, qui sont intervenus pour combler le vide laissé par les banques en matière de prêts.
Le fournisseur de données sur les marchés privés Preqin estime que le capital investi et le capital en attente d’être investi s’élèvent à près de 2 000 T$ US (Graphique 1 ci-dessous), mais un rapport récent de J. P. Morgan1 estime que la taille réelle du marché pourrait être plus près de 3 000 T$ US.
Graphique 1 : Les actifs sous gestion du crédit privé ont connu une croissance significative
Quoi qu’il en soit, l’ampleur et le rythme de croissance de cette classe d’actifs ont attiré l’attention de nombreux investisseurs et, si l’on considère le crédit privé au même titre que les titres de crédit publics, le « crédit » offre généralement plus de possibilités d’investissement.
Quel est le lien entre le crédit public et le crédit privé?
Les « investissements en crédit » constituent une catégorie vaste et variée. Ils couvrent à la fois les marchés publics et privés, les placements de bonne qualité et de mauvaise qualité, et offrent en général aux investisseurs un potentiel de rendement accru, des revenus substantiels et une exposition diversifiée.
Le crédit public comprend les accords de financement facilités par les banques d’investissement et autres institutions financières. La solvabilité d’un émetteur est généralement notée par une ou plusieurs agences et la capacité de prêt est généralement liée à la capacité de l’entreprise à générer des flux de trésorerie ou garantie par un recours à des actifs physiques ou financiers générant des flux de trésorerie. Les institutions financières peuvent souscrire la dette, mais en général elles la syndique ou la distribue à des acheteurs particuliers et institutionnels. En raison de l’implication des banques d’investissement dans la syndication de la transaction et de la base de détenteurs diversifiée, il existe souvent un marché secondaire actif pour la négociation des titres de crédit publics et des prix facilement observables sont disponibles.
Le crédit privé, parfois appelé dette privée, implique des accords de financement négociés en privé. Les conditions du financement sont négociées en privé entre le prêteur et l’emprunteur (« accord bilatéral ») ou entre un petit groupe de prêteurs et l’emprunteur (« prêt syndiqué en circuit fermé »). Les emprunteurs sont généralement des sociétés privées ou des sociétés publiques de petite ou moyenne taille et, comme pour le crédit public, les prêts sont accordés sur la base des flux de trésorerie ou des actifs. Enfin, en raison de leur nature privée (il n’existe pas de marché secondaire actif), les transactions sont souvent exécutées sans notation de crédit et il n’y a généralement pas de prix secondaires facilement observables disponibles.
Le crédit public et le crédit privé comprennent un large éventail de types de transactions, dont les principales catégories sont énumérées ci-dessous.
Graphique 2 : Le « crédit » englobe un large éventail de stratégies d’investissement
Pourquoi nous pensons que le crédit public peut constituer une excellente allocation pour bon nombre de portefeuilles d’investisseurs
Le crédit public est plus liquide
La liquidité a une valeur dans le portefeuille d’un investisseur. Elle lui donne la possibilité de modifier de manière dynamique la répartition de ses actifs, de financer des dépenses imprévues et de tirer parti des distorsions qui se produisent de temps à autre sur les marchés.
Les distorsions du marché du crédit public peuvent être exploitées efficacement pour améliorer les rendements totaux au cours d’un cycle économique
Le crédit public étant plus liquide que sa contrepartie privée, la classe d’actifs peut présenter une volatilité des prix à court terme. Cette volatilité offre aux investisseurs la possibilité d’exploiter ces mouvements de marché si le gestionnaire dispose de la marge de manœuvre nécessaire.
Graphique 3 : Les valorisations sont très cycliques sur les marchés du crédit public
Le vent peut tourner rapidement sur les marchés publics (voir le pic périodique des écarts de crédit illustré dans le Graphique 3) et, à mesure que cela se produit, la fixation des prix évolue également, parfois de manière assez radicale. Une stratégie de crédit public opportuniste, axée sur le rendement absolu, peut se tourner vers des titres mieux notés lorsque les valorisations sont serrées (écarts faibles), et se tourner agressivement vers des titres moins bien notés, à rendement plus élevé, après une distorsion du marché (écarts élevés). Il est ainsi possible de créer un flux de rendement similaire à celui du crédit privé sur le long terme, tout en bénéficiant d’une liquidité et d’une transparence accrues.
Par exemple, les investisseurs peuvent aujourd’hui obtenir des rendements de 5 à 6 % en investissant dans des obligations d’entreprise de qualité à court terme, tout en attendant patiemment la prochaine grande distorsion du marché. Lorsque cette distorsion se produit, et l’histoire a prouvé qu’elle finit toujours par se produire, il est courant d’obtenir des rendements annuels substantiels à deux chiffres dans les années qui suivent la distorsion (voir Graphique 4).
En procédant à une allocation stratégique dans le cadre d’une stratégie de crédit sans contrainte, les investisseurs s’assurent de demeurer dans la classe d’actifs du crédit public et d’être positionnés de manière à tirer parti d’une forte augmentation des écarts de crédit.
Graphique 4 : L’appréciation du capital est elle-aussi très cyclique
Si l’on considère tous ces éléments sur un cycle de marché, un portefeuille de crédit public liquide axé sur l’analyse fondamentale peut viser des rendements à un chiffre de moyens à élevés. Cela se compare favorablement au crédit privé, qui a généré un rendement de 8 % au cours de la dernière décennie2.
L’augmentation des capitaux dans le secteur du crédit privé pourrait réduire les critères de souscription et les écarts de crédit
L’afflux de capitaux vers le crédit privé signifie que plus d’argent est consacré à chaque transaction. Toutes choses égales par ailleurs, si les capitaux continuent d’affluer vers cette classe d’actifs, le risque est que les prêteurs en crédit privé revoient à la baisse leurs critères d’évaluation du crédit et/ou la rémunération qu’ils exigent pour prendre des risques. En outre, si les emprunteurs de moindre qualité obtiennent plus facilement un financement, le risque de défaillances futures lors de la prochaine récession économique augmente.
Comme nous n’avons pas vu les mêmes montants de capitaux arriver sur les marchés du crédit public, ce risque est moindre pour le crédit public.
2Alerte au changement de notation de J.P. Morgan, 5 avril 2024
Les prêts à taux variable peuvent mettre les entreprises sous pression dans un environnement où les taux d’intérêt sont élevés
Le crédit privé est généralement émis sur la base d’un taux variable, ce qui signifie que les paiements de coupons effectués par une entreprise sont fréquemment réajustés en fonction d’un taux d’intérêt au jour le jour. Lorsque les banques centrales ont augmenté les taux d’intérêt en 2022 et en 2023, les entreprises qui ont contracté des prêts de crédit privé ont vu le coût de leur capital grimper en flèche, ce qui a fait baisser les ratios de couverture des intérêts et les flux de trésorerie disponibles pour réinvestir dans leurs activités. Il s’agit là d’une autre source de risque de défaillance à l’avenir.
En revanche, sur le marché des obligations à haut rendement, il est plus courant que les obligations soient émises avec des coupons fixes. Lorsque les taux d’intérêt ont été rapidement abaissés en 2020 et sont restés bas jusqu’en 2021, de nombreux emprunteurs à haut rendement ont profité du financement bon marché pour prolonger la maturité de leur dette, réduisant ainsi les coûts d’intérêt et garantissant leurs besoins de financement à long terme, ce qui a renforcé la résilience de leurs entreprises.
Graphique 5 : Les échéances des obligations à haut rendement sont bien réparties pour les années à venir
Conclusion
Alors que les banques continuent de s’éloigner de leur rôle traditionnel de fournisseurs de capitaux aux entreprises privées, les marchés du crédit privé devraient continuer à se développer parallèlement à leurs homologues publics. Nous ne considérons pas la décision d’allocation d’actifs entre le crédit public et le crédit privé comme un compromis entre l’un et l’autre : ils ont tous deux de la valeur et peuvent constituer des éléments attrayants de l’allocation stratégique d’actifs d’un investisseur.
Bien que le marché du crédit privé ait capté l’essentiel des titres en raison de son argumentaire de vente axé sur le fait que les rendements élevés et la faible volatilité ont entraîné une forte croissance des actifs sous gestion, nous pensons que les investisseurs ne doivent pas perdre de vue la raison d’être d’une allocation significative au crédit public. Ceci est particulièrement vrai pour les stratégies qui peuvent permettre des changements dynamiques importants en termes de qualité de crédit, de géographie et d’exposition à l’échéance. Le crédit public diversifié offre l’un des meilleurs profils risque-rendement parmi toutes les classes d’actifs et peut être un excellent moyen pour les investisseurs de faire travailler davantage leur portefeuille.
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