Élections présidentielles : Un brouhaha sans incidence ou un indicateur pour les marchés?
Par le passé, l’incertitude qui régnait pendant les années électorales a entraîné une volatilité plus élevée que pendant d’autres périodes sur le marché. Étonnamment, on aurait pu s’attendre à une plus grande volatilité et à des rendements potentiellement inférieurs à la moyenne sur les marchés financiers cette année, car 65 % du PIB mondial sera touché par une élection primaire ou une autre. Toutefois, jusqu’à présent en 2024, les marchés boursiers ont affiché de bons résultats, tout comme les obligations, les taux d’intérêt ayant baissé. D’ailleurs, l’indice S&P500 a enregistré ses meilleurs neuf premiers mois d’une année d’élection présidentielle, et les actions mondiales, y compris au Canada, ont aussi généré des rendements intéressants.
Comment expliquer cela? Plusieurs forces sont à l’œuvre, qui influencent les fluctuations à court terme du marché. Il s’agit d’un système adaptatif très complexe et tourné vers l’avenir qui est influencé par une vaste gamme de facteurs (p. ex., les taux d’intérêt, l’inflation, la politique monétaire, la démographie, le chômage, la guerre, le commerce, la géopolitique et les résultats des élections), qui ont tous une incidence sur les rendements et les risques sur le marché. Par conséquent, tenter de prédire avec exactitude les événements à venir – et leurs effets sur le marché boursier – n’est tout simplement pas possible de manière statistiquement fiable. Il est donc important de ne pas rajuster vos portefeuilles en fonction de résultats à court terme prévus.
Toutefois, nous comprenons qu’il peut être difficile d’arrêter l’agitation politique et de rester concentré sur ses objectifs financiers. Soyons réalistes : les États-Unis sont la première superpuissance et la plus grande puissance financière au monde, et il est difficile d’ignorer la politique américaine, surtout au Canada, compte tenu de notre proximité géographique avec ce pays, de notre dépendance vis-à-vis de celui-ci sur le plan commercial et de notre exposition importante aux investissements américains. Les rebondissements des campagnes électorales et les drames qui y sont associés peuvent créer de l’incertitude à court terme, voire une réaction émotionnelle. Cependant, cela ne représente un risque pour votre portefeuille que si vous réagissez à ces événements.
La bonne nouvelle, c’est que vous n’avez pas besoin d’écouter les sondeurs pour préparer votre portefeuille aux résultats des élections. Dans le présent article, nous montrons que le marché boursier, à long terme, continue généralement de progresser, peu importe qui occupe la Maison-Blanche. Ce sont les techniques de gestion de placements ennuyantes et éprouvées – diversifier ses placements et investir dans le temps – qui peuvent assurer la croissance continue de votre patrimoine à l’abri de risques indus.
Un écart apparent entre les politiques et les rendements des marchés financiers
Outre d’importantes questions sociales et de gouvernance, l’économie, les soins de santé, la politique étrangère et la politique fiscale figurent parmi les sujets les plus débattus dans le cadre des campagnes présidentielles américaines. Les candidats des deux partis ont déjà exposé leurs plans de dépenses liés aux soins de santé, à la sécurité sociale, à la défense et, dans certains cas, aux priorités réglementaires dans les secteurs de l’énergie, de la technologie et des services financiers. De nombreux investisseurs se demandent comment le marché boursier réagira à l’élection de l’un par rapport à l’autre.
Dans le tableau 1, nous examinons les six plus récents mandats présidentiels et montrons le taux de croissance annuel composé connexe du marché boursier américain et de différents secteurs, notamment l’énergie, la défense, les soins de santé, la technologie et les services financiers (banques, courtiers et assureurs). L’échantillon est certes petit, mais nous ne constatons pas de lien fort entre les priorités et les politiques de chaque président et les résultats des secteurs au cours de son mandat.
Tableau 1 Taux de croissance annuels composés (en %) du marché boursier et des secteurs aux États-Unis au cours des mandats des derniers présidents
Par exemple, sous la présidence d’Obama et la présidence de Trump, les secteurs qui ont affiché les meilleurs et les plus mauvais rendements étaient presque les mêmes, malgré les différences dans les priorités et les réformes politiques et réglementaires mises en œuvre. De même, pendant le mandat de l’administration Biden, le secteur de l’énergie a été le plus rentable jusqu’à la fin de septembre 2024, malgré une approche moins favorable de Biden vis-à-vis du secteur de l’énergie par rapport à celle de son prédécesseur. Le tableau 1 révèle aussi est que les secteurs ayant affiché les meilleurs et les plus mauvais rendements ne sont pas les mêmes d’un mandat présidentiel de quatre ans à un autre, même si c’est le deuxième mandat d’un même président. Cela soutient l’idée que la stratégie (peut-être ennuyante) qui consiste à diversifier ses placements est efficace.
Il est donc essentiel que vous diversifiiez vos placements sur le plan géographique et selon les catégories d’actifs pour assurer la résilience de votre portefeuille malgré les soubresauts inévitables des cycles du marché. Dans le tableau 2, nous présentons les taux de croissance annuels composés de diverses catégories d’actifs durant le mandat des huit derniers présidents américains, de 1993 à 2024. Les deux tableaux brossent un portrait similaire : les rendements absolus et relatifs des différentes catégories d’actifs ont varié d’un cycle de quatre ans à l’autre et, souvent, n’étaient pas liés aux priorités et aux politiques présidentielles énoncées.
Tableau 2 : Rendements des différentes catégories d’actifs pendant divers mandats présidentiels
Si l’on examine les rendements passés des différentes catégories d'actifs et des différents secteurs, on constate que les craintes ou les attentes optimistes pendant la campagne électorale se sont rarement avérées être une thèse de placement, même quelques années plus tard. Par exemple, bien que ses adversaires considèrent Obama comme étant peu favorable aux petites sociétés et aux banques, durant son mandat, le secteur des services financiers et les actions américaines de sociétés à petite et moyenne capitalisation – deux bons indicateurs du rendement des petites entreprises – ont été parmi les plus rentables. De même, pendant le mandat de Trump, les marchés émergents ont affiché de bons résultats malgré la priorité « America First » (l’Amérique d’abord) du Président en matière de commerce extérieur.
On peut en conclure qu’il est important de diversifier ses placements dans différents secteurs, catégories d’actifs et régions, lesquels sont généralement influencés par une multitude de facteurs sous-jacents variables au fil du temps, y compris les politiques, à différents degrés.
Il faut aussi voir comment le marché boursier américain a réagi aux différentes combinaisons de gouvernements fédéraux américains au cours des 90 dernières années.
Graphique 3 : Indice S&P 500 – Rendement total annuel moyen (1933 à 2023)
Comme le montre le graphique 3, les rendements totaux annuels ont peu varié selon les différentes combinaisons de pouvoirs exécutifs et législatifs unifiés ou divisés. La composition sous-jacente du gouvernement fédéral a donc peu d’incidence sur le rendement du marché boursier américain. Les sociétés, les secteurs et le marché en général s’adaptent au fil du temps.
Se préparer à l’agitation postélectorale
Il est possible qu’au cours des prochaines semaines, la validation des votes, qui pourrait entraîner des contestations juridiques de la part de l’un ou l’autre des partis et des troubles sociétaux, suscite de l’agitation. Nous pensons que cette agitation finira par se dissiper alors qu’on déterminera le vainqueur de l’élection. Voici quelques conseils pour vous aider à vous préparer à toute agitation postélectorale.
S’attendre à l’inattendu
Au cours des prochaines semaines, ou peut-être des prochains mois, comme les votes seront potentiellement contestés, l’incertitude sur le marché pourrait s’intensifier. Il est important d’essayer d’éviter de se laisser influencer par les médias, qui risquent d’employer un ton pessimiste. Les investisseurs ont en effet tendance à réagir en essayant de synchroniser leurs placements avec le marché, c’est-à-dire en liquidant leurs actions pour conserver des liquidités et réduire le risque de leur portefeuille. Par le passé, cette stratégie a constitué une erreur fatale pour les régimes de gestion de patrimoine des investisseurs, car elle perturbe l’effet cumulatif d’un placement dans des actions, ce qui, avec le temps, peut entraîner un manque à gagner important par rapport aux objectifs financiers. Rappelez-vous que liquider ses placements nécessite de sortir du marché et de retourner sur le marché au bon moment. Les chances que vous preniez ces deux décisions au bon moment sont faibles. La réaction émotionnelle à court terme face à l’imprévisibilité des marchés consiste à courir et se cacher; l’investisseur à long terme, lui, conserve ses placements. Il sait que la valeur marchande de son portefeuille diminuera à un moment donné, mais qu’elle se redressera à long terme.
Il est très difficile de faire des prévisions justes
Les sondeurs et les experts se trompent souvent, et les prévisions quant aux contestations juridiques et aux différends liés aux élections pourraient abonder au cours des prochaines semaines. Gardez du recul par rapport à la situation et rappelez-vous que quelques semaines ou quelques mois constituent un horizon à très court terme et que de saines décisions de placement sont guidées par des fondamentaux à long terme. Les sociétés créatrices de richesse qui possèdent de solides avantages concurrentiels et qui offrent des produits et des services de grande valeur devraient persévérer et surmonter les périodes de volatilité, et elles le font souvent, peu importe qui siège à la Maison-Blanche.
La diversification demeure la meilleure approche pour réduire le risque lié aux élections
Nous ne prétendons pas disposer d’un avantage qui nous permet de prévoir avec exactitude un événement futur à court terme; c’est pourquoi nous choisissons de diversifier nos placements, car faire des paris à sens unique n’est pas une stratégie recommandée.
Pour nous, la diversification consiste à penser de manière probabiliste – nous planifions en fonction d’un large éventail de résultats possibles. Par conséquent, nous détenons souvent des actifs qui devraient avoir un rendement différent selon les scénarios futurs. Grâce à cette approche, nous pouvons mieux positionner nos portefeuilles pour assurer leur résilience à long terme. Autrement dit, nous essayons d'être à deux endroits en même temps. De plus, nous gérons le risque en recherchant tout avantage important dans les portefeuilles, c’est-à-dire les points de concentration de tension qui pourraient céder lorsque les temps deviennent difficiles. Par exemple, nous pourrions choisir d’éviter ou de réduire au minimum un placement dans une société qui serait fortement touchée par un résultat électoral donné.
Il est aussi important de garder du recul et d’adopter une vision à long terme
Au-delà des prochaines semaines et des prochains mois, n’oubliez pas que la volatilité à court terme avant et juste après les élections n’a pas freiné les gains à long terme sur le marché boursier pour les investisseurs qui ont conservé leurs placements. Votre portefeuille de placements doit déjà être conçu de manière à vous permettre de faire face à la volatilité des marchés et être positionné de façon stratégique pour générer un rendement tout en respectant le profil de risque correspondant aux objectifs établis dans votre plan de gestion de patrimoine.
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